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Lettres flamandes


Méconnus mais flamands

Les calligraphes n'ont pas été un grand sujet pour les peintres.

Je suis donc heureux en admirant ce portrait peint par Frans Hals en 1638, le seul que je connaisse.

D'autant qu'il représente Jean de la Chambre, un maître calligraphe flamand (1605-1668) de l'école de Haarlem comme nombre d'autres calligraphes.

Regarder ce portrait nous rapproche de ces calligraphes du XVIIème.

Une autre façon de s'en rapprocher est de regarder leurs oeuvres, non seulement les grandes pages impérissables, mais aussi, et peut-être surtout, celle des maîtres de moindre importance.

Je voudrais en donner quelques exemples dans cet article.

Ils nous montrent des petits défauts, des petits accidents  nous les rendant ainsi plus humains et proches de nous qui faisons toutes ces imperfections à profusion avec nos plumes.

 

En premier lieu cette calligraphie de Johannes Heuvelman, qui, lui aussi justement, a travaillé à Haarlem.

 

Bien entendu, elle rappelle une autre calligraphie, celle de G. Carpentier que j'ai déjà montrée (voir mon site web, au chapitre ''livre'' le commentaire de celui sur Saint François de Sales).

Mais la grande spirale est beaucoup plus relâchée et ne tourne pas très rond. Les autres petits motifs ne sont pas très réussis non plus.

Seule l'arabesque du bord droit est impeccable.

Elle est tellement bien par rapport au reste qu'on se demande si elle n'a pas été dessinée au préalable.

Mais là, attention! Toutes ces calligraphies, malgré leurs imperfections sont des oeuvres de Maîtres, et ils ne sont pas Maîtres par hasard mais à la suite d'un travail acharné.

D'autant que ce motif du bord droit est un grand classique des calligraphies de cette époque et on va le retrouver décliné sur plusieurs des images suivantes.

C'est donc un mouvement répété pluriquotidiennement depuis des années!

Le voici ainsi sur la calligraphie suivante datée de de 1635 d'un certain Boonacker sur lequel je n'ai aucun renseignement.

 

Ici c'est justement cette arabesque qui est le moins réussi. Mais rien n'est vraiment parfait non plus.

La calligraphie suivante est signée D.Brechover (?) en 1677, donc plus tardive.

 

Je la trouve intéressante car, si elle a un aspect général un peu brouillon, c'est qu'elle est faite d'un seul jet, sans chercher l'effet.

Elle pourrait presque nous faire croire à une écriture courante.

Le geste est parfaitement assuré, les formes superbes, le trait délicat.

 

Toute autre est la calligraphie suivante, peut-être d'un certain Bartiens.

 

Ici, les formes sont réussies, le trait est assuré, la composition classique.

Ce qui cloche c'est l'écoulement de l'encre de la plume, d'où un aspect empâté.

Personnellement j'ai aussi ce défaut de continuer une calligraphie en sachant qu'un paramètre ne va pas.

Quand un truc cloche, il faut arrêter, résoudre le problème et recommencer.

Et si le problème arrive juste à la fin, comme cela fut sans doute le cas ici?

A voir, ça dépend du but recherché.

Cette calligraphie nous montre autre chose: la grande lettrine est une gravure.

Pourquoi ? Mystère

Mais ça semble être un procédé assez courant, car je l'ai vu un bon nombre de fois.

 

La calligraphie suivante a été attribuée, mais je n'ai pas réussi à lire le nom au crayon.

 

On serait tenté de dire qu'il y a la page de gauche et la page de droite.

A droite, tout va à peu près bien (traduction : j'en ferais autant que je serais hypercontent!).

Malheureusement, la page de gauche me ressemble beaucoup plus (en mieux? Zut!)

On remarque encore ce motif du bord droit.

 

Les calligraphies suivantes ne sont pas signées; elles me semblent un peu plus tardives (sans doute fin XVIIème, voire XVIIIème)

 

 

Je pense, évidemment sans certitude, que les capitales ont été préalablement dessinées puis reprises à la plume.

En soi, ce n'est pas un défaut. Je suis d'ailleurs persuadé que les grands maîtres en faisaient autant, surtout lors de la réalisation de motifs complexes ou les grandes symétries (voir l'article sur Horicke).

 

Les calligraphies suivantes ne sont pas signées non plus.

 

Ici, pas de dessin préalable, tout est à main levé, sans reprise.

C'est magnifique, tout ce que j'aime : de la vie, du mouvement, il y a tout!

Même les accrocs deviennent intéressants!

On remarque le motif du bord droit : naïve beauté, espiègle.

 

Pas d'auteur non plus pour les calligraphies suivantes

 

A gauche, rien n'a été dessiné : le motif du haut n'est pas très équilibré et la capitale ne tourne pas comme on aurait pu s'y attendre mais bien quand même.

La queue du ''y'' est magnifique.

L'ensemble de la page est très agréable et contraste d'autant plus avec la page de droite.

Pourtant le cadre est très beau, bien proportionné, aux symétries parfaites, etc, etc...

Mais ce cadre est une gravure et la différence est flagrante, avec le centre écrit à la main et avec la page de gauche.

La gravure est une perfection froide, tandis que la plume reflète l'âme de son utilisateur.

 

Les calligraphies suivantes ne sont pas signées non plus.

 

A gauche, les lignes n'ont pas été effacées.

C'est émouvant et rare.

J'ai déjà vu, mais très rarement aussi, le dessin d'arabesques non effacé; comme quoi elles étaient bien construites quand il le fallait.

A droite la lettrine et l'ovale sont justement, à mon avis, dessinées (il s'agit sans doute même d'une gravure, comme le cadre précédent)

 

Pour terminer, une calligraphie d'Otto Cornelisz, extraite de son livre ''Album de calligraphies''.

Ce n'est pas le vrai titre du livre mais c'est celui donné par la bnf. (Toutes ces calligraphies viennent de la bnf.)

 

C'est une illustration parfaite de la définition contemporaine de la calligraphie : ''Art du trait''

Le geste n'est qu'aisance, légèreté, sans interdit.

Aucun blocage, quasi enfantin.

 

Les autres calligraphies de cet ''Album'' ne sont pas toutes de la même trempe mais elles ont une personnalité à part, différente.

 


28/01/2019
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Exemple et réalisation

La difficulté, et donc l'intérêt, de l'écriture flamande du XVIIème siècle est son aspect protéïforme.

''a'' peut s'écrire ''a'' mais aussi de bien d'autres manières, de même que toutes les autres lettres de l'alphabet.

Il y a des choix à faire, en fonction de la situation de la lettre par rapport à celles qui l'entourent et aussi de son inventivité.

On retrouve évidemment cette problématique dans tous les styles calligraphiques mais généralement moins dans la diversité des formes.

Quoique... Je me remémore un stage animé par Yves Leterme où il nous a justement enseigné l'importance de s'entrainer à décliner les formes de nos lettres en gestuelle.

En tout cas pour le XVIIème siècle, je pense que cela représentait un champ nouveau de libertés .

 

Aux difficultés de maniements de plume, déjà importants à l'époque et aggravés de nos jours par le fait qu'on ne sait plus tailler les plumes comme il faudrait, s'ajoutent donc les problèmes inhérents au style (au ''design'' comme on dit aujourd'hui).

Ci-dessous, un exemple magnifique de ce style par David Roelands, que j'ai utilisé comme fond pour les titres des vidéos sur les minuscules.

 

David Roelands, Page extraite de son livre ''T'Magazin...'' de 1616

J'ai tenté de montrer dans la vidéo ci-dessous certains aspects qui me semblent importants pour la réalisation d'une calligraphie en Lettre Flamande.

Tout particulièrement les liaisons des lettres entre elles.

Pour cela, j'ai utilisé une phrase inventée pour la circonstance qui m'a permis de glisser plusieurs difficultés.

 

Calligraphie de la phrase
''La Chaise de Monsieur Grignon de Beaufortis, Charles de son petit nom, est avancée.

Pour revenir à David Roelands, il s'agit d'un calligraphe flamand né en 1572 à Anvers.

Il a écrit un ouvrage intitulé ''T'Magazin...'' de gravures, édité en 1616.

Son style est magnifique, très vivant, surtout sa Lettre Italienne très dansante, comme le montre l'exemple ci-dessous.

 

Calligraphie de David Roelands (gravure)

David Roelands faisait donc partie de la corporation (la guilde) très fermée des Maîtres-écrivain des anciens Pays-bas.

Il s'agissait véritablement de l'élite des calligraphes de l'époque.

En firent partie, entre autres, Balderic Van Horicke, Cornelius Boissens et Jan Van den Velde, le plus connu.

La devise de ces Maîtres-écrivain était ''Vive la Plume'' dont voici quelques exemples

 

''Vive la Plume'' de David Roelands (gravure)

''Vive la Plume'' de Cornelius Boissens (1ère page de son livre ''Grammatophices...'' (gravure)

''Vive la Plume'' de Jan Van den Velde (gravure)

''Vive la Plume'' de Balderic van Horicke (calligraphie à la plume)

Ce dernier exemple est évidemment le plus extraordinaire car il n'y a pas d'intermédiaire entre l'artiste et l'observateur.

Plus fort et indépendemment, c'est une calligraphie complètement ébouriffée, une explosion de mouvements et de couleurs.

Une pyrotechnie calligraphique.

 


03/10/2018
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Balderic Van Horicke

Van Horicke est le premier calligraphe flamand du XVIIème dont j'aimerais parler.

Donc avant le célébrissime Jan Van Velde, ne lui en déplaise.

Ils sont pourtant à peu près contemporains, Van Horicke est né vers 1595 et décédé en 1643.

Mais contrairement à Velde qui est bien connu, au moins de la sphère calligraphique, Horicke ne l'est pas du tout.

Et pourtant son oeuvre est formidable à plus d'un titre.

En particulier il oppose magnifiquement la calligraphie ''savante'' et une calligraphie ''usuelle'', qui ne se préoccupe pas d'être bien faite mais qui déborde de vie.

Son oeuvre, abondante, est essentiellement manuscrite, ce qui explique sa très faible diffusion et qu'il soit très peu connu.

Mais aujourd'hui il n'est plus besoin de gravures, le numérique permet une diffusion bien plus simple.

Le fait même que ce que l'on peut voir aujourd'hui soit des manuscrits est totalement excitant, bien plus que des gravures !

 

 

''Livre d'exemples pour le duc Wolfgang Whilelm von Pfalz-Neubourg'' Page 26

Cette première page tirée du ''Livre d'exemples...'' (vers 1632) nous donne de suite le niveau de cet artiste. Le lion a une qualité de trait et de forme, en particulier l'arrondi de son encadrement, tout à fait extraordinaire.

Elle nous introduit également dans un art aujourd'hui un peu perdu, celui du dessin en ''trait de plume'', c'est à dire soit-disant d'un seul trait sans lever la plume.

Horicke excellait dans ce genre de dessin.

La calligraphie est un exemple de Lettre Espagnole

 

''Livre d'exemples pour le duc Wolfgang Whilelm von Pfalz-Neubourg'' Page 9

On voit ici toutes les qualités de Van Horicke, une calligraphie exceptionnelle de finesse (en Lettre Flamande), une construction très rigoureuse des arabesques et le sens du dessin.

La composition présente très souvent une symétrie très importante, parfois quasi parfaite.

Cet aspect symétrique se rencontre chez beaucoup de Maîtres écrivains, sans doute pour une raison de mode mais surtout pour bien montrer leur habileté.

Horicke pousse cette manière à son extrème mais toujours avec une grande intelligence.

Horicke ''croque'' ses personnages ou ses animaux en leur donnant vie et expression.

Ci-dessous, en détail, le joueur de bignou.

 

joueur de bignou par Van Horicke

Van Horicke est également un artiste de l'encadrement en arabesques. Elles sont presque toujours très construites, quasi géométriques mais avec un grand sens de la variation parfois subtile.

Ca me fait penser à l'art de la fugue en musique; J.S.Bach n'est pas encore né mais le monde des arts s'apprête à l'accueillir.

 

''Livre d'exemples pour le duc Wolfgang Whilelm von Pfalz-Neubourg'' Page 12

L'encadrement est ici particulièrement magnifique, tout simplement majestueux.

Quelle maîtrise d'éxécution ! C'est pas une gravure, là, c'est la plume directement sur le papier !

Du coup, la calligraphie en Lettre italienne, superbe en elle-même, est parfaitement mise en valeur.

Si le bestiaire est très important, présentant des animaux de toutes sortes, de tous continents, avec une grande justesse et expressivité, ce livre présente seulement trois écritures : flamande, italienne et humanistique.

Ce ne sera pas le cas avec son livre suivant justement intitulé ''Livre contenant plusieurs sortes d'écritures...'' datant de 1633 environ.

La page de titre est des plus étonnantes, puisque c'est un cheval fougueux qui sert d'encadrement.

 

 

''Livre contenant plusieurs sortes d'écritures...'' Page 2
(La page 1 est une calligraphie de ''Vive la Plume'' des Maîtres Ecrivains)

Le dessin du cheval est extrèmement moderne, et fait penser aux chevaux de la bande dessinée ''Blueberry''.

Il a un panache extraordinaire.

Le titre est écrit sur son flanc en français et entre ses pattes en espagnol, utilisant chancellière et humanistique.

 

Pour moi, cette page-titre est totalement unique dans sa conception.

En fait, elle introduit une notion méconnue concernant la calligraphie latine.

C'est la conception de l'unicité de l'art du trait: la calligraphie et le dessin ou la peinture sont la même chose.

C'est en fait l'approche du ''shufa'' chinois que l'on traduit assez improprement par ''calligraphie chinoise''.

La peinture y est un poème sans mot et les mots calligraphiés une peinture non figurative.

 

Xixiangji (epoque Ming fin17ème) édition xylographique

Xuwei (1521-1593)(époque Ming) ''Raisins''

On voit bien sur les deux oeuvres ci-dessus la complète similitude entre calligraphie et dessin (le grec utilise du reste le même mot ''graphos'' pour désigner à la fois le dessin et l'écriture, d'où calligraphie).

On ressent bien en regardant cette page-titre, et tout ce qui va suivre, que Van Horicke avait parfaitement conscience de cette similitude, que chaque trait de plume étair pour lui l'occasion de mettre de la vie sur son papier, que ce fut figuratif ou non.

C'est la première fois que je vois ça chez un calligraphe occidental et je n'ai pas souvenir d'en avoir vu d'autres par la suite (hors contemporains); des dessins à la plume il y en a beaucoup, mais où le trait soit ''habité'' de cette façon, là je ne vois pas.

 

Donc, au final, le cheval n'encadre pas une calligraphie, mais l'ensemble de la page EST calligraphie.

Et je laisse à chacun le soin de trouver le sens à donner à ce dessin-calligraphie.

 

Les pages suivantes montrent un Abcdaire en capitale flamande suivi d'un petit texte avec des écritures différentes, évoluant progressivement de la batarde gothique flamande vers la lettre flamande cursive (2°type de Velde).

Le décor montre aussi des animaux mais de façon plus équilibrée avec le reste de l'encadrement toujours en arabesques éblouissantes.

 

''Livre contenant plusieurs sortes d'écritures...'' Page 3

De ''A'' à ...

 

Le seul dessin de chat que j'ai pu trouver chez Van Horicke.

Un plutôt l'air débile.

Alors qu'il y a des chiens ''en veux-tu en voilà'', et généralement pas très sympathiques

Tant pis

 

''Livre contenant plusieurs sortes d'écritures...'' Page 25

...''Z''...

 

Magnifique page.

La petite flamande cursive est vive, légère, bondissante.

La scène du chamelier pleine d'esprit.

Tout est parfait.

 

''Livre contenant plusieurs sortes d'écritures...'' Page 24

...en passant par ''Y''

 

Si je reviens une page en arrière, ce n'est pas pour le chien gentiment bénêt ni pour le volatile qui imite sa démarche derrière lui de façon inénarrable.

Non, c'est pour le texte;

Je le retranscris en orthographe moderne

''L'ivrognerie est un vice malséant...

La personne qui s'adonne à ce vice abominable travaille en pratique pour sa destruction...

Il se trouve engouffré en toutes imperfections ou actions impertinentes.

Garde-toi donc de t'adonner à ce vice''.

 

Après une telle déclaration, la conscience est bien dégagée pour écrire de nombreuses chansons à boire comme Van Horicke le fera !

 

Les pages suivantes présentent des chancellières et des lettres humanistiques.

Il n'y a plus de grandes lettrines mais des compositions avec personnages ou animaux avec ou sans arabesques.

 

 

''Livre contenant plusieurs sortes d'écritures...'' Page 26

Voilà une bande de joyeux rockeurs du XVIIème siècle surplombant 2 duettistes

Les personnages sont bien typés, très amusants; on dirait du pré-Franquin.

la page suivante montre une composition semblable mais avec des angelots et qui débutent une nouvelle série de compositions symétriques, parfois totale

 

''Livre contenant plusieurs sortes d'écritures...'' Page 24

Les deux pages ci-dessous répondent-elles à une réalité du XVIIème, un vécu ou un quotidien ?

En tout cas les dessins sont admirablement croqués.

 

''Livre contenant plusieurs sortes d'écritures...'' Page 37

''Livre contenant plusieurs sortes d'écritures...'' Page 52

Au final, ce livre contient 53 planches calligraphiées; il est de grande taille puisqu'il mesure 41,6x32cm.

Van Horicke a écrit un autre livre ''Prodigium imo miraculum...'' en 1638, mais qui reprend beaucoup du livre précédent et avec des pages uniquement dessinées.

 

Par ailleurs, Horicke a écrit plusieurs recueils de musique.

Il a ainsi copié nombre de musiques des grands compositeurs de l'époque, tous français, dont Antoine Boësset (surintendant de la musique du roi et maître de musique de la reine), Michel Lambert (dont la fille épousera Jean Baptiste Lully) et Etienne Moulinié.

 

Ces livres débutent avec une page où se trouve calligraphié un poème.

 

 

Poème au début d'un des livres de musique

Cette page et toutes celles des livres de musique ne sont pas destinées à des calligraphes ou étudiants calligraphes.

Ils ne sont donc pas sophistiqués comme les livres précédents mais ils sont une application directe et concrète des livres précédents.

Je parle bien sur des textes écrits et non des dessins.

Ces textes, c'est à dire les paroles des chansons, sont comme écrits  couramment, de façon relachée, sans réflexion particulière.

Il n'y a évidemment pas eu de lignes-guides de tracées, donc ça monte et ça descend un peu parfois.

MAIS, il se trouve que ces lignes ont été écrites par quelqu'un qui a prouvé qu'il était un des meilleurs calligraphes de tous les temps.

Et tout son art transpire à chaque trait qu'il trace.

Et la Vie s'échappe de chaque lettre et nous entraine dans sa musique étenelle.

Je ne peux m'empêcher de mettre un détail de la page ci-dessus

 

Poème au début d'un des livres de musique (détail)

On ne peut qu'admirer la justesse des formes, et leurs richesses expressives, le ''G'' aux formes généreuses et le ''H'' tout sourire !

Le toucher de plume est remarquable; malgré la rapidité apparente d'exécution, il reste savant, virtuose.

Tensions, relâchements, fougue, rondeurs : tout transpire de vie.

 

Merci Maître Horicke de ne pas avoir gravé ces pages et de nous permettre d'admirer votre main !

 

Après ces premières pages avec un poème, alternent une page avec un dessin en ''trait de plume'' et une avec une composition musicale.

 

Les musiques copiées par van Horicke furent donc écrites par des musiciens de premier plan, les plus proches de Bruxelles étant évidemment à la cour de France.

Elles sont tout à fait représentatives de la musique profane d'alors et consistent essentiellement en des musiques chantées, soit encore de façon polyphonique, soit en mélodies accompagnées par un instrument (luth, théorbe, clavecin, etc.). Ces compositeurs sont les créateurs de la ''basse chiffrée'' qui permet d'improviser un accompagnement et ils achèvent d'affirmer la supprématie de la tonalité sur les anciens modes ecclésiastiques

Il y a trois types principaux de chansons dans le corpus Horicke : des arias, des chants pour danser et des chansons à boire.

Elles sont pour la plupart du type mélodie accompagnée, et donc écrites sur deux lignes.

 

On remarque que la notation musicale est très proche de la notre.

Par contre, bien que la musique soit précisée en 3/2, les barres de mesure ne sont pas indiquées. On a ici une clé de fa et une clé d'ut 4ème ligne, écrites comme aujourd'hui.

Les portées sont manifestement faites avec une plume spéciale à 5 lames, dite ''plume à portées'' : il ne s'agit pas d'un papier à musique pré-imprimé car on peut voir les lignes verticales disant où débuter et où finir les portées.

 

On remarque aussi la conjonction des 2 types de calligraphie sur la même page :

enlevée dans le feu de l'action avec l'arabesque du haut

posée, réfléchie, dessinée avec l'arabesque du bas

 

Pour vous permettre de vous rendre compte de ce qu'est cette musique, vous pouvez cliquer sur le lien ci-dessous qui vous fera entendre une chanson de Michel Lambert, le musicien le plus représenté chez Horicke, tout en suivant les paroles sur la partition. (vous pourrez constater que la notation musicale typographique de cette époque n'est pas la même que celle manuscrite)

 

Aria ''Vos mépris'' de Michel Lambert

Musicien danseur par Van Horicke

Tous les dessins ne sont pas des musiciens. Il y a aussi des femmes, parfois légères, des couples et des ivrognes.

Ce qui m'amène aux chansons à boire qui sont nombreuses; c'était presque un genre à part entière.

Peut-être que ça permettait d'équilibrer le sérieux des arias. On est en fait proche de Molière et de ses ballets.

Toujours pour vous rendre compte de ce que cela donne, un lien pour voir un petit spectacle reprenant l'esprit chanson à boire, de Michel Lambert toujours.

 

Airs sérieux et à boire de Michel Lambert

Chanson à boire copiée par Horicke

Sur cette page, toujours beaucoup de libertés.

La petite arabesque du haut est très bien faite, les formes, toujours un point fort.

Les lignes sont un peu fluctuantes, c'est sur.

A noter que la clef de sol est une forme ancienne.

La barre du dernier ''t'' ébauche une tête de personnage.

 

musicien masqué ''à la vénitienne'' par Horicke

Voilà un coup de projecteur sur un immense artiste méconnu qui était d'une virtuosité au moins égale à celle des noms les plus célèbres, mais qui a eu une vision de la calligraphie surement plus élevée, moins repliée sur elle-même.

Peut-être

 


17/09/2018
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Modèle pédagogique

Ici plus qu'ailleurs, c'est la structure des lettres qu'il faut retenir.

En effet, la présentation des lettres, leur ornementation, s'adapte en fonction du contexte d'utilisation.

La technique particulière de taille des plumes d'oiseau s'étant perdue, c'est vers les plumes métalliques qu'il faut se tourner, pointues ou carrées, selon le résultat souhaité.

Ici j'ai utilisé une plume carrée, comme sur la vidéo.

 

Capitales de lettre flamande

Sur la page suivante, je propose les formes de base des petites capitales, celles qui sont utilisées dans les corps de texte.

Elles sont évidemment écrites avec la même plume que le texte, à savoir une petite plume carrée très souple.

 

En dessous, sur 2 lignes,  je montre un alphabet de minuscules avec différentes variantes, parmi les plus courantes, mais ce n'est pas limitatif car la multiplicité est trop grande.

En fait, c'est une écriture créative et chaque calligraphe peut créer des formes de lettres, surtout dans le domaine des liaisons, mais aussi dans les abréviations.

Ici j'ai mis quelques liaisons courantes ''de'' et aussi une liaison ''rs''.

Ces liaisons sont une caractéristique de cette écriture, ce qui la rend difficile à écrire (et à lire).

Une fois ces difficultés surmontées, quel charme !! quel imagination foisonnante !!

 

Il s'agit d'une petite écriture; sur cette page, le module des lettres varie de 1 à 3mm ( les lignes de minuscules sont sur un module de 2mm)

Si des explications supplémentaires sont nécessaires, n'hésitez pas à me les demander dans un commentaire.

 

Ensuite, j'ai mis un exemple des 4 types les plus courants de lettre flamande tels que les distingue Jan Van den Velde.

J'ai toujours utilisé la même phrase ( le pangramme bien connu ''Portez ce vieux whisky au juge blond qui fume'')

Le 1° type est le plus posé, le plus rond. C'est le plus facile.

Le 2° est plus cursif.

Le 3° est comme le 2° mais italiqué vers l'avant.

Le 4° est comme le 3° mais italiqué vers l'arrière; C'est le plus difficile, car il nécessite une plume biseautée à l'envers.

 

 

La Lettre flamande : petites capitales, minuscules et différents types

La lettre flamande nécessite des manipulations de plume.

Rien de telle que la vidéo pour initier à cet art., en deux volets ci-dessous

 


29/08/2018
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